Encouragé dès l’enfance par son père, un ingénieur aéronautique américain, James Turrell devient pilote à l’âge de seize ans. Son adolescence il la passe à des milliers de mètres du sol, dans les airs, au coeur de l’immensité et des nuages. C’est à ce moment là que naît sa fascination pour la lumière, l’espace et les formes abstraites. Dans son cockpit, Turrell fait l’expérience de ce paradoxe : l’enfermement au milieu de l’infini, la solitude face à l’étendu du monde.
Il consacrera sa vie à retranscrire ce sentiment paradoxal, cette vision céleste du monde en dispersant sur Terre ses “Skyspaces”. Ces drôles de petites chambres, ces espaces clos dont les plafonds s’ouvrent vers le ciel, invitent à l’introspection et à la contemplation. Au travers de ces oeuvres immersives Turrell offre au spectateur une expérience artistique intense : l’installation lumineuse est pratiquement thérapeutique, d’un esthétisme pur, quant au silence qui règne dans ces espaces confinés, il est d’une profondeur troublante. Mystiques, ces lieux d’art ne sont pas sans rappeler les monastères tibétains que l’artiste découvrit durant son service militaire, on pense aussi aux calmes et blanches églises orthodoxes éparpillées dans les Cyclades, où à tout espace évoquant recueillement et apaisement.
À cette dimension spirituelle s’ajoute une vision totalement futuriste et avant-gardiste de l’expérience artistique. Sa démarche minimaliste et conceptuelle était déjà totalement inédite au début des années 60 mais Turrell continue aujourd’hui à révolutionner le monde de l’art. En 2019 le rappeur et compositeur Kanye West organise ses “Sunday Services”, sortes d’expériences artistiques et musicales uniques dans la tradition gospel, au sein du Roden Crater, un mont volcanique de l’Arizona que Turrell s’attelle à transformer en oeuvre d’art depuis 46 ans. C’est depuis le hublot d’un avion que l’artiste a repéré ce volcan dormant : "C’est un coin où vous avez l’impression de vous tenir à la surface de la planète", confie-t-il. Le but de cette association étant de lier musique, espace et lumière afin d’atteindre un état de bien-être total.
Pour les fervents disciples du Beau, James Turrell a créé sur Terre un pèlerinage de ces “Skyspaces” holistiques et presque un peu magiques. Au coeur du tumulte à Los Angeles, dans une forêt au Japon ou au sommet d’une montagne en Suisse, vous trouverez une petite chambre, un espace de confinement volontaire, où vous reposer, méditer et contempler.
Piz Uter, 2005 Zuoz, Suisse
Revised Outlook, 2005
Santa Monica, Californie, États-Unis
Above Horizon, 2004 Appartient à James Goldstein Beverly Hills, Californie, États-Unis
à gauche Unseen Blue, 2002 James Turrell Museum Bodega Colomé, Salta, Argentine
à droite Outside, Insight, 2011 Järna, Södertälje, Suède