La collection d’art fut souvent perçue à travers l’Histoire comme l’apanage de l’homme. Pourtant, de la décoration au mécénat en passant par la création de musées, de nombreuses femmes ont donné tort à ce cliché séculaire. Voici un petit tour d’horizon des femmes les plus influentes de l’histoire de l’art...
Durant La Renaissance, les femmes de pouvoir eurent massivement recours au mécénat pour asseoir leur position au sein d’une société dominée par l’ostentation et la représentation. Catherine de Médicis, s’inspirant du modèle laissé par son beau-père François Ier, accueille à sa cour les plus grands artistes européens de l’époque. Passionnée d’art et de curiosités, sa collection compte des tapisseries d’Orient, de riches étoffes, des sculptures incrustées d’ivoire, des centaines de tableaux et sept crocodiles en peluche. À une époque de guerre civile, cette Reine fascinante fut l’une des premières à renforcer le prestige royal grâce à une exposition culturelle somptueuse.
Personnage éblouissant de la fin du 19ème siècle, Nélie Jacquemart, issue d’une milieu modeste, parvint à se hisser, grâce à son talent et son goût, dans les hautes sphères de l’art et des milieux parisiens. Après des études à l’école de peinture des Beaux-Arts où elle est l’une des premières femmes à être acceptées, elle se spécialise dans le portrait mondain. C’est ainsi qu’elle fait la connaissance de son futur époux, Édouard André, banquier richissime, dont elle tombe passionnément amoureuse. Ensemble, ils parcourent l'Europe et Nélie, en collectionneuse hors du commun, acquiert une multitude œuvres exceptionnelles que l’on peut aujourd’hui découvrir dans leur magnifique hôtel particulier du boulevard Haussmann, le Musée Jacquemart-André.
À vingt-et-un ans la visionnaire Peggy Guggenheim quitte les hautes sphères de la société new-yorkaise pour s’installer dans le Paris des années folles. C’est à cette époque qu’elle rencontre Beckett, Man Ray, Giacometti, Duchamp et Brancusi. Débute alors une vie tumultueuse consacrée à la constitution de sa collection, passée entre son palais vénitien et sa galerie londonienne. Au moment de l’invasion allemande, Peggy Guggenheim cherche à mettre sa collection à l’abri. Elle sollicite le Louvre, qui considère que “ces œuvres ne méritent pas d’être sauvées”. De justesse elle parvient à rapatrier ces dernières à New York, où elle les expose et change pour toujours la face de l’art américain.
Cubistes, surréalistes, cinéastes, danseurs, photographes, écrivains… Les plus grands noms de l'avant-garde française sont passés par cette villa moderne, dessinée par Robert Mallet-Stevens, perchée sur les hauteurs d'Hyères, repaire de Marie Laure et Charles de Noailles. Ce couple mythique, mécènes du siècle, fut essentiel à la création artistique, littéraire et intellectuelle de l’époque. Dans leur collection on trouve des sculptures antiques, des Goya, des Dali, des Rubens, les œuvres de Paul Klee, Picasso ou Mondrian, des boules à neige, des manuscrits inachevés, une cinquantaine de cartes postales et tellement de photos comme autant souvenirs d’une époque étincelante et farfelue…
Connue pour son flair hors pair, amatrice d’arts africains et océaniens, de Chagall, Braque ou Picasso, Helena Rubinstein collectionnait les pierres précieuses autant que les toiles de maître. Passionnée d’architecture et d’arts décoratifs, elle est aussi la commanditaire de salons de beauté et d’immeubles à des architectes du mouvement moderne. Définitivement l’une des plus grandes impératrice du bon goût.
Cette mécène, également sculptrice de renom au début du 20ème siècle, occupa un temps un atelier à Passy ou Rodin lui prodigua de précieux conseils. De retour à New York, elle décida d’ouvrir un musée afin d'aider les jeunes artistes de son temps, parmi lesquels on retrouve les noms de Hopper et de Calder ainsi que d’Isabel Bishop ou Agnès Pelton. C’est donc bien à Gertrude Vanderbilt, épouse Whitney, que l’on doit la naissance du Whitney Museum, riche de 23 000 œuvres, aujourd’hui implanté au bord de la baie d’Hudson dans le quartier en pleine ascension de Meatpacking District à Manhattan.
Abby Rockefeller, Lillie Bliss et Mary Quinn Sullivan
C’est au cours d’un déjeuner en 1928, que Lillie Bliss, Abby Rockefeller et Mary Quinn Sullivan, trois femmes aux origines sociales, personnalités et sensibilités différentes, décident de s’associer pour créer un musée entièrement consacré à leur passion commune : l’art moderne. Il leur faut moins d’un an pour organiser leur première exposition qui a lieu au 12ème étage d’un immeuble à quelques blocs de Wall Street. A cette occasion les « Ladies du MoMA » réunissent des oeuvres de Cézanne, Gauguin, Seurat et Van Gogh auxquels s’ajouteront au fil des ans Daumier, Degas, Derain, Matisse, Modigliani, Picasso, Redon, Renoir, Rousseau ou Toulouse-Lautrec… formant ainsi le noyau de la collection du MoMA, l’un des plus importants musées au monde.
Collectionneuse et mécène, cette arlésienne de coeur est à la tête de l'un des projets les plus ambitieux de la décennie : faire d’Arles une capitale de l’art contemporain et inaugurer l’immense fondation LuMa, dont le campanile futuriste de neuf étages dessiné par Frank Gehry domine dorénavant la ville. Lieu artistique, écologique et social, cette fondation est une utopie devenue réalité imaginée par cette femme ambitieuse et énergique. Comme Catherine de Médicis, Maja Hoffmann s’intéresse à “l'impact de l'art et de la culture sur un lieu et son rayonnement”. Pour elle ce centre culturel entraînera un cycle de production artistique, intellectuel et économique dans toute la Camargue. Vive Arles donc, et vive l’art !