En 1947, Yves Klein découvre le judo, une pratique qui devient rapidement essentielle pour lui. Il s'engage pleinement dans cet art martial, atteignant le grade de 4e dan, ce qui lui permet de l'enseigner. À l'époque, il est le seul occidental à avoir atteint un tel niveau de maîtrise de cette discipline. C’est également au Japon, le pays du Soleil levant, qu'il commence à s’intéresser au monochrome, influencé par la philosophie et l'art japonais. De retour en France, Klein publie Les Fondements du judo, avec l’ambition d’ouvrir une académie tout en poursuivant sa carrière artistique. Malheureusement, la Fédération française ne reconnaît pas sa ceinture obtenue à l’étranger, l’empêchant d’enseigner officiellement. Cet obstacle le pousse davantage vers sa deuxième passion : l’art et la peinture.
Le judo devient ainsi un élément clé pour comprendre sa démarche artistique. Comme l’explique Klein : « Ce qui m’intéresse, c’est le mouvement du Judo, la fin du mouvement qui est toujours abstrait et purement spirituel ». Pour lui, « Le judo c’est de l’art, c’est un art de la même valeur que la grande musique car il doit être recréé chaque fois que l’on veut de nouveau en jouer. C’est un art personnel et universel car c’est l’art dans le combat autrement dit la vie elle-même. »
Cette approche du combat le mène à étudier en profondeur le corps et le mouvement, une exploration qu'il poursuit également au Japon. Son art trouve une forme unique dans les Anthropométries, un rituel où le modèle, enduit de pigment bleu breveté IKB (« International Klein Blue »), imprime son corps sur une toile, que ce soit appuyée au mur ou posée au sol comme sur un tatami. Ces performances, à la fois rituelles et théâtrales, se déroulent souvent devant un petit auditoire, accompagné par un orchestre jouant la Symphonie monotone de Klein, une seule note tenue pendant 24 minutes, suivie de 24 minutes de silence. Les Anthropométries révèlent la beauté en captant la présence du modèle, tout en mettant en scène la conception de l’art selon Klein : créer un moment vécu, surprenant et provocant, suscitant une nouvelle sensibilité.