Alors que la fermeture au public est imminente, nous démarrons la visite accompagnés d'une excellente guide : je pensais réviser mes classiques mais j'ai plutôt appris pleins de choses...
Créé en 1793, le Louvre réuni sur près de 75 000 m2 d'exposition des oeuvres de l'Antiquité à 1848 (ensuite le Musée d'Orsay expose les travaux de 1848 à 1914 et Beaubourg prend le relais avec les mouvements de 1914 à nos jours).
Il est donc normalement invisitable en 1h30 sauf dans ce contexte exceptionnel : seuls et au calme.
Nous avons passé en revue une dizaine de grands chefs d'oeuvres qui y sont présentés dont 3 fameux sur lesquels nous allons nous attarder... Le message de l'historienne est clair : l'évolution observée dans les oeuvres n'est pas tant liée à un progrès dans les techniques ou dans le savoir-faire mais à l'évolution des mentalités, elle est le résultat "du changement d'espace mental".
La Vénus de Milo
Cette sculpture est considérée comme un chef d'œuvre car c'est un original grec retrouvé sur l'île de Mélos (et pas une copie Romaine d'après un original grec).
Ce demi nu massif représente la déesse Aphrodite dont la neutralité du visage souligne le classicisme de l'époque où "un sourire était une grimace de l'âme" (Platon).
Trouvée en 1820, les conservateurs de l'époque ont volontairement décidé de ne pas lui refaire ses bras ce qui témoigne de l'évolution des moeurs : c'est la fin de la Renaissance et l'homme n'est plus le centre du monde.
Après le début du Moyen-Age où l'individu est moins important que le groupe, que les peintures sont exclusivement religieuses et que la perspective est proscrite - le corps de l'homme fait de l'ombre et empêche la lumière (Dieu) de passer - nous arrivons dans les salles du grand Léonard de Vinci (qui a récemment battu des records).
Nous nous arrêtons d'abord devant La Vierge, l'Enfant Jésus et Saint Anne.
Réalisée en 1503, c'est une oeuvre inachevée mais aboutie dans sa construction.
Elle est organisée comme une icône et pleine de symboles : Saint Anne, la mère de Marie, est au dernier plan, elle domine l'ensemble et la vierge s'inscrit à l'intérieur de sa mère : elles partagent la même paire de bras et de jambe. Le petit Jésus est retenu par sa mère mais commence à partir. L'objectif du peintre est de souligner la double nature de Jésus : divine par son père et ici, humaine par sa mère.
La sprezzatura du travail de Vinci est très frappante : tellement naturel et bien réalisé qu'on n'en ressent pas sa complexité, "le vrai art est celui qui ne semble être art"...
On arrive ensuite au face à face avec la mythique Joconde.
Réalisée entre 1503 et 1506 à Florence, la Joconde est un portrait d'Elisa Gherardini (Madonna Elisa devient Mona Lisa), commandé par son mari, Francesco Del Giocondo.
Il n'est pas si grand, ni particulièrement beau mais pourquoi est-il donc si important ?
En fait, c'est un portrait très moderne : elle n'est plus une effigie comme les portraits de l'époque mais c'est bien une représentation de quelqu'un de vivant.
Elle se tourne comme si elle allait nous parler... Elle a une légère expression, elle sourit et cette expression fugitive montre que le peintre veut saisir "la vie".
On comprend aussi pourquoi nous avons le sentiment qu'elle regarde partout : le peintre n'a pas marqué le trait qui donne une direction au regard. Elle est très en confiance avec un cadre qui souligne l'harmonie qui règne entre l'homme et la nature (avant 1527 et le sac de Rome).
L'artiste devient un créateur : la nature n'est pas une reproduction mais il veut reproduire son processus créatif.
Alors si ce n'est pas l'autoportrait du peintre comme certaines légendes le raconte, on peut dire que c'est son autoportrait "mental" : toutes les techniques / tous ses carnets de croquis y sont !
Un autre phénomène a accru sa célébrité, elle a été perdue en 1911...
Son dernier voyage date de 1973 et depuis elle n'a pas été de nouveau prêtée.
Un grand merci pour cette soirée très privilégiée à Toto et 14Septembre au Louvre