Il était une fois : Giacometti, 46 rue Hippolyte Maindron...

C'est là, dans une cité d'artistes du XVe arrondissement de Paris, à l'angle de la rue du Moulin Vert, que Alberto Giacometti choisit d'installer une fois pour toutes son domicile-atelier.

On est à la fin de l'année 1926... Il y vivra jusqu'à la fin de " sa vie "... presque quarante ans... en se réservant bien-sûr des séjours annuels à Majola et à Stampa son village natal des Grisons. 

Des comptoirs de café aux recoins des bordels, Montparnasse est son royaume depuis longtemps. Le 46, rue Hippolyte Maindron est un rez de chaussée médiocre de 25 m2 sans eau courante ni poêle à charbon.

Diego son frère, devenu son assistant installera à son tour son atelier juste à côté... Atelier qui deviendra la chambre du couple à partir de 1947 pour Alberto et sa femme Annette. " Archipel " de trois pièces contiguës qui n'ont rien d'idylliques... Sa " grotte " l'appellera-t-il...

Giacometti n'habite pas son atelier, il fait corps avec lui : il dessine, esquisse, grave sur les murs et note comme il le fait aussi sur les nappes en papier du Dôme et de la Coupole.

Françoise Gilot en visite avec Pablo Picasso dira : " A bien regarder ce " blanc cimetière "... recouvert d'un lit de cendres... on se croirait à Pompéi. " Et Jean Genet de renchérir : " Toute sa personne à la couleur grise de son atelier... par sympathie peut-être il a pris la couleur de la poussière. " " Émouvant charnier de plâtre qui témoigne du patient et grandiose acharnement " de l'artiste. 

Sur le sol, une croix rouge marque au sol l'emplacement exact de la chaise de cuisine où, posent pendant de longues heures ses modèles favoris : Annette, Diego, Caroline, Yanaihara... Les murs sont nus et recouverts de graffitis ; c'est un chaos de table, sellette, tabourets, palettes, pinceaux , socles, chevalets, bouteilles, oeuvres achevées et inachevées, les mêmes qui entouraient sa mort en 1966 ; c'est l'atelier de Giacometti. 

De Beauvoir, Sartre, Genet,... Char... Man Ray, Brassai, Cartier-Bresson, Ernst Scheidegger, Sabine Weiss... Doisneau... autant d'amis qui passent et immortalisent par des bons mots ou de belles images l'antre du sculpteur... Reste cependant l'énigme d'un temple de la création de tant de chefs d'œuvre... Lorsque Breton demande à Giacometti en 1934 " qu'est ce que ton atelier ? ", il lui fait cette réponse : " ce sont deux petits pieds qui marchent. "


C'est ainsi que l'on peut retrouver la reconstitution quasi-parfaite de l'atelier d'Afredo Giacometti. C'est vers la rue Victor Schoelder, au numéro 5, que l'Institut Giacometti ressuscite ce Lieu magique, 25m2 où se rejoue la scène de ce combat sans fin avec la matière. C'est grâce à sa femme Annette, qui, contrainte de quitter les lieux en 1972 confie au Musée de l'Homme le soin de conserver l'ensemble de l'Atelier... jusqu'à déposer deux des quatre murs... que l'on retrouve ici. 


La visite de l'Institut est ouvert à tous sur réservation pour favoriser une relation intime à l'œuvre. " L'atelier, c'est comme l'intérieur de mon crâne ... " On y rentre donc avec émotion.