J'aimerais rendre hommage à l'admirable couple Pompidou...qui voyait la création contemporaine comme un facteur « de démocratisation culturelle, de vitalité sociale et de modernisation du pays ».
Georges et son épouse Claude étaient animés par la même passion dévorante pour l'art et en particulier par celui de leur temps. Le dandy et l'élégante blonde se rencontrent à Paris en 1930 et ne se quittèrent plus. Major de Normal en 1935, Georges commence d'abord par l'enseignement (Marseille et Paris). Après deux ans de mobilisation, il décide avec Claude d'adopter un enfant, Alain, à ses 3 mois. C'est en 1944 qu'il rejoint le gouvernement provisoire et c'est vraiment post seconde guerre mondiale que leur intérêt pour l'art contemporain s'exacerbe.
Ils s'offrent leur premier toile contemporaine en 1947, une peinture de Youla Chapoval. Très vite, ils y prennent goût et des oeuvres de Arman, César, Christo, Klein ou Hartung rejoignent leur appartement rue de Seine. Que des coups de coeur ! Ils privilégient systématiquement « l'émotion à la raison ». Comme Georges le dit « « En art ce n'est pas l'intelligence qui juge et discerne, ce sont les sens ». Leur quotidien est baigné par cette soif d'art. Ils sont également convaincus que pour connaître la peinture il faut fréquenter leur auteurs et les ateliers. Les grandes amitiés du couple avec les artistes de l'époque en témoignent : Delaunay, Niky de Saint Phalle, Soulages, Vasarely, etc. Ils font des détours en vacances chez Hartung et sa femme Anna-Eva Bergman à Antibes, chez Max Ernst à Seillans ou encore chez Soulages à Sètes.
On retrouve cette diversité artistique Quai de Béthune, sur l'Ile Saint Louis, le dernier appartement qu'habitera le couple. D'autres merveilles viendront compléter leur collection : Nicolas de Staël, Tal Coat, Picabia ou encore Fontana. La culture, l'humour, la légèreté et le non-conformiste de Claude lui permettait d'avoir une excellente aisance sociale. Tandis que la « tranquille détermination » de Georges lui permit de monter les échelons politiques progressivement : il devient le chef du cabinet du Général de Gaulle en 1948. A cette occasion il rencontre André Malraux dont il devient très proche. C'est lui qui lui fera découvrir Soulages dont un grand format trônera au dessus du bureau de l'hôtel de Matignon quelques années plus tard.
Il est élu Président en juin 1969 et eut le recul nécessaire pour voir Mai 68 comme le « symptôme d'un décalage entre le développement économique et technique rapide du pays et une forme de conservatisme dans le domaine des moeurs et de la culture ». Ses choix politiques ont été guidés par cette conviction que la culture est le moteur d'un pays, un véritable enjeu stratégique dans son épanouissement national et son rayonnement international. Il reconnaissait que « la France est un pays où l'on sait mieux protéger le patrimoine que soutenir la création ». Le remède de ce malaise : la création contemporaine comme un facteur « de démocratisation culturelle, de vitalité sociale et de modernisation du pays ».
Le couple a également le culot de revoir l'aménagement du Palais de l'Elysées comme pour servir d'exemple. Ils remplacent des tableaux classiques par des oeuvres contemporaines et modernisent certaines salles : Pierre Paulin va se charger notamment de la réalisation d'un salon et d'une salle à manger extrêmement moderne pour l'époque (il paraît que la reine d'Angleterre avait été très amusée).
Guidé par sa conviction forte, seul et contre tous, il a été a l'initiative de Beaubourg (Centre Pompidou). Ce lieu sera le carrefour de la création sous toutes les formes, l'art, le spectacle, le design et le livre.
« Il faut aider à créer un besoin du beau, il faut que le peuple aime la beauté, c'est une question d'éducation, de formation du goût..., il faut le même va-et-vient entre la conservation et l'innovation ».
Le lieu choisi étonnait déjà : le plateau Beaubourg (appellation ironique sans doute) était un dédale de ruelles sombres et sales. Il avait également annoncé en découvrant le hoix du jury pour le projet architectural de Renzo Piano et de Richard Rogers (parmi 681 projets reçus !) « ça va faire crier ». Malgré ça, il a été au bout de ce projet complètement fou qui a transformé le centre de Paris.
Fin 1976, le Centre est inauguré : le premier musée français d'art contemporain !
C'est également à Georges que l'on doit la naissance du musée Picasso en 1971 et l'initiative de la transformation de la Gare d'Orsay en musée (à la place d'un hôtel !) en 1973. Le grand homme d'état et homme d'esprit meurt en 19174 d'une maladie rare, son épouse poursuivra sa quête.
« La culture c'est ce qu'il faut ajouter à une journée de travail pour en faire une journée de vie » Duhamel
Comme ce couple admirable, n'oublions pas d' « être à l'affût du lendemain !! »
Une autre histoire des Pompidou
de Alain Pompidou et César Armand
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