ce site utilise des cookies pour vous offrir la meilleure expérience.
hjksdhskhdskhdh
Il y a 0 produits dans votre panier. Il y a 1 produit dans votre panier.
CONNEXION / INSCRIPTION Bonjour
MON COMPTE
FAVORIS
PANIER
Retour
TRANSCRIPTION
Au début on est décontenancé. Qu’est que c’est ? Qu’est ce que c’est que cette chose ? Est-ce que je peux dire que c’est de la peinture ? Est ce que je peux dire que c’est un tableau ? Alors que rien apparemment ne semble peint. Je me pose cette question, est-ce que c’est un tableau ? Parce que je reconnaît, nous reconnaissons tous, nous avons tous en mémoire des formes et que je vois que là, devant moi, sur cette objet, il y a un cadre. Ces quatre morceaux de bois peint, extrêmement simple, élémentaire qui forment une sorte de carré dans lequel il y quelque chose, ça ressemble à un tableau mais ça n’est pas ce que nous avons l’habitude de penser être comme un tableau. Pourquoi ? Parce que qu’est-ce qu’il y a la dedans ?
Comme je ne sais pas, comme c’est étrange, je le regarde justement avec cette étrangeté, cette étrangeté qui fait que je commence à regarder, je m’approche éventuellement, je m’arrête sur des détails et je vois qu’il y a là du tissu, de la toile, de la toile de lin, j’ai l’impression, c’est ce que je vois, notamment dans la partie qui est en bas à droite, qui n’est pas peinte, qui n’est pas recouverte de couleur et qui nous fait penser. Puisque ça me fait penser ça me rappelle, ça convoque mes souvenirs qui me fait penser à de la toile en attente de peinture. Sauf qu’il n’y a pas un morceau de toile, mais des morceaux de toiles. Et c’est morceaux de toiles sont assemblés d’une drôle de manière, ils sont cousus, il sont cousus, tantôt bien cousus bord-à-bord, tantôt, si j’ose dire mal cousus, bizarrement cousus. Il y a des plis, il y a des fils, il y a de la couture, ça rappelle plus l’art du patchwork, l’art du kilt que l’art de la peinture.
Pourtant il y a ce cadre. Alors à quoi il sert le cadre ? Comme son nom l’indique, le cadre il sert à cadrer, à recadrer. Nous avons l’habitude d’avoir cette forme de limite qui fait que nous regardons ce qu’il y a à l’intérieur, et comme il y a ce cadre et ces formes à l’intérieur, tout a coup on voit que les formes créent un effet de composition, un effet de structuration. Quatre grandes formes de quatre couleurs différentes, une grège, une en bas à gauche bleue presque blanche, une haut blanche légèrement crémeuse, sur laquelle il y a ce fragment de jaune plissé et puis cette grande forme bleue avec une sorte de pli au milieu, une sorte de fente au milieu. Quatre formes, quatre couleurs, dont l’assemblage créé un cinquième forme, cette cinquième forme c’est ce que je suis quand même tenté d’appeler un tableau.
Pourquoi ? Parce que finalement qu’est-ce que je vois ici ? Je vois des formes assemblées dans un cadre. Je vois des couleurs réparties différemment. Je vois des textures et je vois vraiment ces textures, je les ressens en regardant, extrêmement différenciées.
Regardez, regardez la toile qui paraît pas peinte, celle qui est en bas à droite, regardez comme on voit, on sent la trame et regardez dans la partie qui est jaune, le plissé, à quelle point ce plissé nous est incroyablement sensible du fait même qu’il contraste avec les reste et du fait même que ce tissé est comme mit en valeur, exaucé presque, par la présence de ce fil. On a envie de toucher. C’est à dire que, on est à la fois tout à fait dans quelque chose de comme un tableau, j’ai parler de couleur, j’ai parlé de formes, en fait j’ai parlé de composition. Et en même temps, on a des sensations de texture, des qualités de texture extrêmement différenciées. On a quelque chose qui est plus lisse, on a quelque chose qui est plus rugueux, on a quelque chose qui est plissé, on a des choses qui sont encore différentes.
Quels sont les objets du monde, si ce n’est les oeuvres d’art, qui peuvent avec des moyens aussi économes, nous donner des sensations aussi différentes ? Le lisse, le rugueux, le doux, le plus dur, l’économie de moyens. Nous sommes devant de la peinture, mais de la peinture sans pinceau, de la peinture sans les moyens de la peinture. Alors si c’est un tableau qu’est-ce que c’est ? La question on ne peut pas ne pas se la poser, on a tous toujours envie de se la poser, on est tous toujours tenté de trouver de la ressemblance.
Un paysage, une fenêtre ouverte sur quelque chose, on a peut être en tête cette phrase de la Renaissance, d’Alberti, qui dit que le tableau est comme une fenêtre ouverte sur ce qu’il appelle la « storia », sur l’histoire, sur la narration, sur le récit. Une fenêtre ouverte sur quoi ? Je ne sais pas. Je ne sais pas et c’est tant mieux, cette indécision qui fait que l’un verra un paysage, l’autre verra une fenêtre, le troisième verra une nature morte, le quatrième verra de la peinture abstraite et le cinquième verra que ça n’est pas de la peinture, c’est précisément la liberté extraordinaire que nous laisse les oeuvres.
Alors l’artiste, il nous aide un tout petit peu, l’artiste il s’appelle, et je ne sais pas qui il est, et est-ce que j’ai besoin de le savoir, ça n’a pas d’importance. Il s’appelle Ethan Caflisch et cette oeuvre s’appelle « Spending the night in a different bed » : passer la nuit dans un autre lit.
C’est son titre, et plus exactement c’est son titre générique, puisqu’il appartient à un ensemble sur lequel l’artiste travail depuis des années, qui est une série qui porte ce titre générale : Passer sa nuit dans un autre lit.
Alors est ce que le titre c’est la clé ? Est ce qu’il y a une solution? Si il y a une solution c’est qu’il y a un problème. Non le titre c’est une indication c’est une possibilité, c’est une suggestion. « Passer la nuit dans un autre lit », qu’est ce qu’il nous vient tout de suite ? L’artiste travail, comme toujours les artistes, avec notre mémoire. « Passer la nuit dans un autre lit », ah oui un lit, ce que nous avons là, c’est du tissu matelassé cousu, comme sur un matelas, on entend matelas, matelassé dans un autre lit, passer la nuit dans un autre lit, qu’est-ce que ça signifie? On est pas dans le monde de la description, ça ne ressemble pas visuellement à un lit, on est dans le monde de la sensation. J’ai commencé au début en disant qu’on est décontenancé, mais est ce que dans le fond, fondamentalement, ce qui n’est pas intéressant c’est d’être décontenancé, je regarde je ne sais pas ce que je regarde et tout à coup je m’ouvre à une autre sensation. Être dans un autre lit, ouvrir une autre fenêtre, faire de la peinture autrement, c’est commencer à voir.