Les papiers découpés de Matisse

J'ai toujours adoré les collages et gouaches découpées de Matisse.

Ils apparaîssent en 1941, dans sa « seconde vie » artistique. Malade, ses douleurs l'empêchent de travailler paisiblement et l'oblige à passer 3 ans dans une clinique avant de se reposer dans un hôtel sur les hauteurs de Nice. En tout état de cause, il ne pouvait plus rester longtemps debout et se concentra alors sur des petits travaux et des illustrations. 

Ses papiers découpés sont nés de ces allers-retours chez l'éditeur Emmanuel Teriade, dans la salle de rédaction il commença à arracher et découper des formes et des caractères d'imprimerie... Les premiers découpages sont visibles dans le livre « Jazz » dans lequel il s'est occupé des illustrations. Ses créations proches de l'art naïf, populaire et spontanés sont inspirées des contes, des cirques, des voyages et de la musique... une nouvelle façon pour lui de s'échapper.

Le plus grand projet de cette « série » fut sans doute celui des vitraux de Vence qu'il accepta grâce à son amitié pour une religieuse qui fut son infirmière de 1942 à 1943. Il se mit au travail avec enthousiasme et choisit pour guider ce projet un extrait de l'Apocalypse : « au milieu de la place, de part et d'autre du fleuve, il y a des arbres de vie qui fructifient douze fois, une fois chaque mois ; et leurs feuilles peuvent guérir les païens ». C'est la naissance de son fameux motif - L'Arbre de vie - représentant une branche à douze feuilles.

Bien rétablit il reprend la peinture à l'huile en 1944. Toutes les toiles réalisées à cette époque sont intensément colorées et rayonnantes de sérénité et on y retrouve des formes flottantes, héritages de ses collages. Regardons ensemble le Rideau égyptien, sa dernière toile importante. On y retrouve à la fois les thèmes de prédilection de l'artiste - la fenêtre et la nature morte - et des motifs répétés colorés et forts : le palmier qui explose comme un feu d'artifice derrière la fenêtre et le pan de rideau qui reprend un motif exotique très gai. Il utilise beaucoup la couleur noire, pas pour assombrir mais pour éclairer et faire ressortir la forme et la couleur. La lumière n'est pas absorbée par le noir qui au contraire la réfléchit. L'alternance des formes négatives et positives crée un sentiment de profondeur de l'espace et des surfaces.Une exposition en 1953 présentera ses « papiers découpés » à Paris, un an avant sa mort.


J'aime bien rapproché les collages de Marie-Claude Bugeaud - clin d'oeil au Regard, oeuvre in situ dans la chambre de l'Art Room - à cette série de Matisse...

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